Alerte sur la rémunération des distributeurs de produits d’assurance
La Commission européenne souhaite interdire la rémunération des distributeurs de produits d’épargne et d’assurance sous la forme de commission au profit des honoraires. Comme ce qui est très répandu aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.
En effet, selon la commissaire européenne aux services Mairead McGuinness, le système de commissions nuirait aux conseils des clients en privilégiant des contrats pour lesquels les conditions de rémunérations seraient plus avantageuses, cela serait aussi source de conflits d’intérêts entre les intermédiaires financiers. Ses travaux autour de cette question devraient voir le jour début avril 2023.
Le système de commission mis en danger ?
Cette menace d’interdiction de la part de la Commission européenne n’est pas nouvelle, déjà en 2014, lors de la rédaction de la directive de distribution de l’assurance (DDA), ce projet avait été évoqué. Il est facile de constater que celui-ci avait été mis de côté jusqu’à présent.
Cependant, face à l’arrivée très prochaine des élections européennes en 2024, Mairead McGuinness souhaite faire avancer le processus, plus déterminée que jamais à faire adopter son modèle basé sur le 100 % honoraires.
En réponse à cette interdiction, l’ACPR (l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution) travaille de son côté sur une recommandation qui aura pour but :
- de donner les bonnes pratiques concernant la rémunération des distributeurs de produits d’assurance (banques, agents généraux, courtiers)
- et de prévenir des conflits d’intérêts entre les intervenants.
Le texte de cette recommandation n’est pas encore rendu public et est encore soumis à consultation par des professionnels de l’assurance. Elle devrait voir le jour courant mai 2023.
En mettant au clair les détails de rémunération des intermédiaires de l’assurance, l’ACPR veut frapper fort et former “une sorte de sécurité préventive”, dans ce contexte où les rémunérations sont scrutées de près menaçant les commissions au profit des honoraires.
D’après l’Argus de l’assurance, l’ACPR porterait un point d’honneur à ce que les assureurs et les intermédiaires n’instaurent plus de politique de rémunération incitative, qui pourrait être à l’origine de conflits d’intérêts ou de nuire à l’intérêt des clients.
Comprendre le problème entre commission et honoraire
La commission est un pourcentage d’une transaction commerciale, et son montant varie selon le montant de la transaction.
Tandis que les honoraires sont liés à une activité de conseil sans lien forcé avec l’exécution d’une transaction commerciale. Ils sont fixés de manière indépendante selon les intermédiaires.
Le commissionnement est comme une mutualisation du conseil : il socialise le coût du conseil financier pour tous les investisseurs, qu’importe leur situation et leurs ressources, ce qui profite aux moins aisés d’accéder à un minimum de conseil.
Le système d’honoraires, lui, aurait pour conséquence de creuser un écart entre les différents investisseurs. Réduisant alors l’accès aux conseils financiers pour les moins aisés.
La France ayant pour rémunération les deux systèmes, est grandement préoccupée par cette menace d’interdiction des commissions et est contre le 100 % honoraire.
- En effet, la commission est pratiquée par la majorité du réseau de distributeurs (agents, courtiers …) sur de nombreux produits de vie – dommages – santé – prévoyance et incluant l’emprunteur.
Passant sur un système 100 % honoraires, l’enjeu serait bien trop important pour tous les intermédiaires français et cela provoquerait une difficulté pour les petits épargnants pour avoir un accès à conseil de qualité.
Bien opposées à ce système, les organisations professionnelles telles que France Assureurs, les associations de CGP, La Fédération bancaire française… se mobilisent pour tenter de ne pas faire appliquer cette RIP (retrait investment strategy : réglementation rédigée par la commissaire bruxelloise venant à interdire les commissions au profit des honoraires).
Pourquoi faut - il se méfier du 100 % honoraire ?
Dans les pays qui ont supprimé le mode de rémunération par commissions, il a été constaté que les conseils donnés sont beaucoup moins qualitatifs, et certains pays comme le Royaume-Uni, dix ans après avoir généralisé les honoraires est en train de faire machine arrière. En effet, les intermédiaires préféreraient conseiller les personnes dont ils sont certains d’obtenir des honoraires élevés.
En réalité, un phénomène de conseil “low-cost” a aussi été constaté, les clients préféreraient prendre des conseils moins chers, privilégiant alors leur porte monnaie au détriment de la qualité du conseil.
C’est tout l’intérêt des commissions : de mutualiser les coûts des conseils afin que tout le monde puisse y avoir accès. Cela représente un réel atout pour les consommateurs, mais également pour la stabilité des marchés.
Attention, il est évident que les commissions n’ont pas que des avantages, c’est certain, des conflits d’intérêts sont parfois constatés entre les différents intermédiaires. Mais rien n’est parfait comme toute chose dans ce monde.
L’anticipation de L’ACPR
En réponse à cette menace contre les commissions, l’ACPR est en cours de rédaction d’une recommandation qui aura pour objectif de stopper les couacs du marché qui font tiquer la Commission européenne en défaveur des commissions.
Cette recommandation est clairement une anticipation sur la mise à jour de la DDA, le régulateur veut prendre les devants en interdisant toutes les formes de rémunérations incitatives incluant les bonus de rémunérations et les avances de commissions telles que les précomptes.
Prévenir avant que la suppression totale des commissions ne nous tombe dessus :
En effet, les précomptes qui sont très pratiqués, notamment dans le domaine de la santé et de la prévoyance, seraient incompatibles avec la DDA et font partie des rémunérations qui inciteraient la vente de contrats pour lesquels la rémunération est plus intéressante.
Une chose avec laquelle la Commission européenne n’est vraiment pas friande.
L’ACPR veut frapper fort
Avec sa recommandation, le régulateur souhaite de la transparence, un devoir de conseil, et du respect de l’intérêt du client.
Dans ce contexte où les commissions sont très fortement menacées, cette recommandation est comme le dernier recours avant la suppression totale du commissionnement.
Rappelons que lorsque l’APCR recommande une bonne pratique, tout intermédiaire et assureurs est en droit de la suivre comme de s’en écarter, mais il faut bien noter qu’en cas de contrôle, l’ACPR peut décider d’appliquer des sanctions pour non-respect.
En conclusion, on espère que cela va calmer le jeu, en montrant que les commissions ne sont pas un mode à systématiquement écarter et que Bruxelles tempère sa menace, laissant place à l’ouverture d’un système dans lequel différents modes de rémunérations coexistent.
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